Les retards de paiement sont un fléau pour les entreprises qui se retrouvent en difficulté financière… mais ils reviennent comme un boomerang au visage des mauvais payeurs, avec des conséquences tout aussi dangereuses à moyen et long terme. Pour éviter de tendre les relations commerciales et de s’exposer à des pénalités de retard, la dématérialisation de la comptabilité fournisseur est une réponse efficace à ses dysfonctionnements. Avant de devenir une obligation légale d’ici le 1er juillet 2024. Explications.

Comptabilité fournisseur : un levier de la profitabilité de l’activité

Une entreprise, c’est un client avant d’être un vendeur. Matières premières, composants, sous-traitance : la fonction Achats se charge de se fournir en biens et services nécessaires à la production, et le comptable fournisseur traite le processus de facturation qui en découle. Il agit au côté du service des achats pour établir un prévisionnel, rechercher les fournisseurs et négocier avec eux afin de maîtriser les coûts et optimiser la marge bénéficiaire de l’entreprise. Mais ses missions cœur de métier demeurent la réception des factures entrantes, les rapprochements bancaires, les écritures d’achats ou encore le règlement des fournisseurs… dans le respect des délais légaux.

Les délais de paiement sont en effet encadrés par le Code de commerce et le Code de la commande publique. La règle générale ? Un délai de règlement 30 jours s’applique pour les transactions B2B en France, à compter de la date de réception des marchandises ou de l’exécution d’une prestation. L’article L441-10 du Code de commerce précise néanmoins que deux partenaires commerciaux peuvent convenir d’un délai négocié jusqu’à 45 jours fin de mois ou 60 jours francs à compter de la date d’émission de la facture. Il doit être mentionné dans les conditions générales de vente (CGV).

Depuis la loi de modernisation de l’économie de 2009 (LME), des accords dérogatoires s’appliquent dans certains secteurs professionnels (articles de sport, jouets, horlogerie, etc.). Des délais spécifiques ont également cours dans l’alimentation (produits périssables, boissons alcooliques) et l’élevage.

Amendes et pénalités en cas de retard de paiement

Un retard dans le règlement des fournisseurs expose l’entreprise à des sanctions. L’article L441-16 du Code du commerce indique que l’amende administrative peut atteindre 75 000 euros pour une personne physique et 2 millions d’euros pour une personne morale en cas de dépassements répétés des délais. Un montant doublé en cas de réitération dans les deux ans.

Les CGV et la facture fournisseur peuvent mentionner un barème de pénalités de retard. Son niveau correspond au taux directeur de la Banque centrale européenne (BCE) majoré de 10 points. À cela s’ajoute une indemnité forfaitaire de 40 euros au titre des frais de recouvrement, introduite par le décret n° 2012-1115 du 2 octobre 2012.

La loi Pacte de 2019 a ajouté à cet arsenal la prise en charge pour l’entreprise en faute des frais de publication dans la presse de la décision de sanction, en plus de sa mention sur le site internet de la DGCCRF.

Les retards de paiement, une bombe à retardement

Les retards de paiement sont une réalité pour les entreprises : plus de 11 jours en moyenne d’après une étude du cabinet KPMG publiée fin 2021. Il estime le nombre de factures échues impayées à près d’une sur quatre, ce qui représente un manque à gagner de plus de 20 milliards d’euros pour les entreprises françaises selon BFM Business. Les premières victimes sont les TPE et les PME. Le rapport 2020 de l’Observatoire des délais de paiement notait en effet que plus de la moitié des grandes entreprises continuent de payer leurs fournisseurs au-delà de 60 jours, tandis que près de trois PME sur quatre les règlent dans le délai légal.

Pour le fournisseur, la conséquence immédiate d’un retard de paiement est d’être confronté à des problèmes de trésorerie. Une rentrée d’argent retardée impacte son besoin en fonds de roulement (BFR) et le met en difficulté dans le paiement de ses propres factures, mais aussi de ses charges courantes. C’est l’effet boule de neige : une trésorerie dans le rouge le contraint à reporter ses investissements et peut même l’amener à prendre des mesures radicales pour préserver son activité, comme des licenciements. Les retards de paiement sont en cause dans une défaillance d’entreprise sur quatre d’après le baromètre ARC/Ifop, ce qui en fait le premier motif de faillite en France.

Pas uniquement une question de réputation

Pour le mauvais payeur, les retards de règlement entachent son image auprès de ses fournisseurs, notamment lorsqu’ils sont répétés. Ils viennent dégrader la relation commerciale, ce qui peut se traduire par des négociations moins avantageuses et des conditions de paiement plus strictes dans le meilleur des cas... mais aussi la rupture de l’approvisionnement et l’attaque en justice. Et un conflit lié à un retard de paiement peut faire tache d’huile : pénalités et/ou amende à régler, mauvaise publicité liée à sa publication par la DGCCRF, mauvaise réputation auprès des autres fournisseurs, etc. Sans compter l’impact en interne pour la comptabilité générale ; la mauvaise gestion du compte fournisseur entraîne une perte de temps tout aussi néfaste pour la valeur de l’entreprise.

Comment en arrive-t-on à multiplier les retards de paiement ? Deux raisons principales peuvent conduire à cette situation :
•    une démarche cash assumée (et risquée) pour préserver la trésorerie ;
•    des process de comptabilité fournisseur dysfonctionnels.
Dans le second cas, les retards de paiement sont généralement la conséquence de processus manuels qui augmentent les risques d’erreurs. Elles peuvent intervenir dans la saisie des informations, la validation ou le suivi. Sans outils performants, la comptabilité fournisseur est en effet une succession de tâches chronophages à faible valeur ajoutée qui phagocytent le temps des collaborateurs, allongent les délais de traitement et rendent difficile la traçabilité des actions effectuées.

Opter pour une transformation digitale adaptée

La dématérialisation du processus de facturation fournisseur corrige les principales causes identifiées des retards de paiement :
•    les erreurs de saisie via l’automatisation ;
•    la validation des factures grâce à un workflow plus fluide ;
•    le suivi de l’ensemble en raison d’une traçabilité des opérations.

Mener un projet de transformation digitale de la comptabilité fournisseur n’impose pas un choix unique pour toutes les entreprises. Il existe en effet une multitude de solutions de dématérialisation ! Avant que l’obligation de recevoir des factures fournisseurs électroniques ne s’applique au 1er juillet 2024, les TPE et PME ayant une faible volumétrie de factures entrantes à traiter peuvent arbitrer entre deux solutions :
•    une numérisation simple consistant à scanner la facture papier ;
•    une solution de traitement par reconnaissance optique (OCR), qui permet d’extraire les données vers un fichier lisible par l’ERP.

En cas de forte volumétrie, la dématérialisation de l’ensemble du cycle fournisseur va permettre de bénéficier d’une intégration automatique des données comptables et des étapes du traitement des factures de l’achat jusqu’au paiement directement dans l’ERP. Là encore, une graduation est possible entre la réception de factures PDF ou de flux EDI.

Dans la balance bénéfices/risques, les conséquences négatives des retards de paiement (réputation, sanctions) l’emportent largement sur le faible gain en trésorerie à court terme. Digitaliser la comptabilité fournisseur permet à la fois de répondre à cette problématique et d’anticiper l’obligation de facture électronique qui arrive à grand pas ! La conduite du changement était une démarche nécessitant du temps pour optimiser ses chances d’apporter les bénéfices escomptés, il est important de s’y prendre maintenant afin de modifier les pratiques au sein de l’entreprise en douceur plutôt que dans l’urgence.
 

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