De nombreux métiers dans les directions financières sont en pleine mutation avec l’arrivée tonitruante de l’IA et de l’automatisation des process sans oublier un rôle récent endossé par les DAF : celui de « business partner ». Cette mutation s’accompagne d’une autre : celle de l’application progressive de la réglementation européenne relative à la CSRD. Que se cache-t-il derrière cet acronyme ? Un peu de patience, on vous explique tout…

 

Livre blanc tendances des directions financières en 2024

Les bases de la CSRD

La CSRD est le nom anglais de la Directive Européenne « Corporate Sustainability Reporting Directive ». Elle vient d’être transposée dans le droit français en fin d’année dernière ce qui fait d’elle une obligation pour les entreprises. Elle va rentrer progressivement en application. Commençons par vous donner quelques clés de cette directive.

Elle a pour but de renforcer les obligations de reporting extra-financier. Dans le même temps, elle élargit le champ des entreprises concernées, le contenu des informations à fournir et durcit leur vérification. La CSRD est la suite de la NFRD (Non-Financial Reporting Directive) de 2014 qui avait été transposée dans le droit français en 2017 avec la Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF). 

 

Concrètement, en quoi consiste ce nouveau reporting de durabilité ?

  • Il repose sur un principe de double matérialité. Il intègre l’impact des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance sur la valeur de l’entreprise et en retour l’impact de l’entreprise et de sa chaîne de valeur sur l’environnement.
  • Il renforce le rôle des organes de gouvernance pour la gestion des risques de durabilité et la production du reporting.
  • Il a pour objectif de rationaliser les informations présentées dans ces reportings grâce aux ESRS (European Sustainability Reporting Standards).
  • Il est lié au reporting financier ce qui demandera une collaboration plus étroite entre les directions financières et les équipes en charge de la RSE.
  • Il est inclus dans le rapport de gestion de l‘entreprise et doit être vérifié en externe.

 

Le calendrier de déploiement

Cette directive ne sera pas appliquée à tous et son déploiement va être progressif comme nous l’avons évoqué plus haut. Voici le calendrier qui a été retenu par le législateur :

  • A partir du 1er janvier 2024 (reporting publié en 2025) :
    • Reporting sur l’exercice 2024 pour les sociétés cotées, les établissements de crédit et les organismes d’assurance (grandes entreprises et celles avec plus de 500 salariés).
    • En 2025, les sociétés qui ne remplissent pas ces critères mais qui sont actuellement soumises à l’article L. 225-102-1 du code de commerce devront publier une DPEF .
  • A partir du 1er janvier 2025 (reporting publié en 2026) : grandes entreprises dépassant au moins 2 des 3 seuils (25M€ de total de bilan, 40M€ de chiffres d’affaires net, 250 salariés)
  • A partir du 1er janvier 2026 (reporting publié en 2027) : PME cotées avec la possibilité d’un opt out jusqu’en 2029 (reporting sur l’exercice 2028).
  • A partir du 1er janvier 2028 (reporting publié en 2029) : entreprises de pays tiers ayant un chiffre d’affaires européen supérieur à 150 M€ et une filiale ou succursale basée dans l’Union européenne.

 

Les enjeux de ce nouveau reporting

Les associés du cabinet PwC, Emilie Bobin et Sylvain Lambert dans le rapport : Priorités 2024 des Directions Financières estiment qu’il ne s’agit pas d’un simple reporting en plus mais en réalité d’une nouvelle clé de lecture de la performance des entreprises. L’objectif du législateur est de donner autant d’importance à la RSE qu’à la finance dans l’évaluation de la performance d’une entreprise. Ce rapport PwC montre que ce sujet est pris très au sérieux par les DAF puisque 47% des répondants ont déjà lancé un projet de mise en conformité CSRD. Cet ajout est considéré comme plutôt complexe puisque 80% des DAF interrogés jugent l’effort de la production de ce reporting comme élevé.

 

L’environnement est une tendance de fond, bien au-delà de cette directive. Elle nous concerne tous. A ce sujet, une enquête publiée en juillet 2023 sur l'environnement de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc) a montré que l’environnement était le 2e sujet de préoccupation des français. De plus, 93% des DAF européens ont mis en exergue l’importance des sujets de durabilité en entreprise dans une étude de Horvath conduite en 2022 malgré le coût financier de cette prise en compte. Lorsqu’une préoccupation devient un enjeu de société, il est toujours important de le prendre sérieusement en compte pour éviter de se laisser distancer. Car une chose est sûre, si vous le faites pas, d’autres le feront !

 

Sa mise en place en entreprise

Les DAF ne pourront pas travailler seuls sur ce sujet et générer ce reporting sans l’aide des équipes RSE. Ils devront en outre comprendre la logique des équipes RSE mais aussi se plonger dans ces dispositifs opérationnels s’ils veulent produire des reportings qui ont du sens. Le lien entre les 2 équipes, aux habitudes et enjeux qui peuvent différer, devra trouver ses marques et fera certainement l’objet d’ajustements. L’implication des 2 équipes va être cruciale, chacun pouvant enrichir le travail de l’autre. Il sera important de clairement définir les rôles et périmètres de chacun pour cette nouvelle tâche. Et l’enjeu est de taille car selon le rapport PwC, 43% des DAF pourront se servir de ces indicateurs pour engager une démarche de transformation RSE au sein de leur entreprise. On entendra certainement parler de cette réglementation dans les prochaines années.

 

Même si toutes les entreprises ne sont pas concernées par cette réglementation, on perçoit aisément l’enjeu transformationnel et structurant de cette dernière. Comme nous pouvons le voir dans de nombreux métiers, nous sommes dans une période de grands changements. Aujourd’hui plus que jamais, il est crucial de prendre le train en marche au bon moment pour ne pas se laisser distancer de manière irrémédiable. 

Tendance n°5 des directions financières en 2024 : l'environnement et la CSRD
L’impact de la CSRD pour les DAF
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